Chaque année, 11 milliards de kilos de plastique finissent dans nos océans, la plupart via les rivières. River Cleanup, un partenaire d’A.S.Adventure, tente de mettre un terme à cette situation. C’est le cas en Albanie, où l’un des fleuves les plus pollués d’Europe se jette dans la Méditerranée.
Texte : Tom Peeters pour le A.S.Magazine
Photos : Ines Goovaerts
Une plage déserte en Albanie. Devant nous la mer Adriatique scintille, derrière nous s’étendent des collines vert fluo parsemées de sentiers sinueux invitant à des randonnées sans fin. Les vaches paissent près de l’eau, une brise titille l’herbe de la plage. L’image serait parfaite, sans la tête humaine qui gît à nos pieds dans le sable, arrachée à un mannequin. À côté, un flacon de pilules, un autre de shampooing, une pantoufle et une brosse à dents. Les débris proviennent de l’embouchure du fleuve Ishëm, l’un des fleuves les plus pollués d’Europe. Chaque année, 700 000 kg de déchets se déversent ici dans la Méditerranée. Une partie de ces déchets s’échoue immédiatement sur le rivage, tandis que le reste est décomposé par la mer en petites particules - les microplastiques - qui se retrouvent dans la chaîne alimentaire. Et finalement dans nos estomacs.
Selon le WWF, la Méditerranée est l’une des mers les plus polluées au monde. Elle ne contient qu’un centième de l’eau mondiale, mais sept pour cent des microplastiques y flottent. Et de tous les pays méditerranéens, l’Albanie est celui qui recycle le moins. L’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN) a calculé que plus de 10 millions de kilos de déchets albanais finissent dans la mer chaque année. À l’image d’un robinet déversant continuellement du plastique. Pourtant, il y a de l’espoir. Sur la plage, des gens se rassemblent, des volontaires de River Cleanup venus d’Albanie et de Belgique. Ils retroussent leurs manches et remplissent 400 sacs poubelles en un rien de temps, ce qui correspond à 2 000 kilos de déchets sauvages.
Effet gouttelette
En plus du nettoyage, nous sommes également ici pour des visites d’écoles. Douze écoles, toutes situées le long du fleuve Ishëm, participent au River School Challenge. Les élèves sont familiarisés avec la problématique, organisent des activités de nettoyage et apportent à l’école les déchets plastiques de leur foyer. Une entreprise locale de gestion des déchets leur verse un montant par kilo collecté, argent qu’ils utilisent pour financer des livres de bibliothèque, des ballons de football ou des cours d’anglais supplémentaires. River Cleanup récompensera d’un montant supplémentaire l’école qui aura collecté le plus de plastique. « Nous faisons cela pour l’environnement, mais aussi pour nous-mêmes », déclare une jeune fille de quatorze ans. « Pour les poissons et les tortues », ajoute un garçon. « Beaucoup de gens pensent que l’Albanie est un pays sale. Si nous ne nettoyons pas, qui le fera ? » demande un troisième. Thomas de Groote, fondateur de River Cleanup, se réjouit : « Vos réactions me donnent beaucoup de fierté et de courage. » C’est l’effet escompté : en touchant le cœur des enfants, il veut aussi toucher le reste de la société albanaise. Ce n’est pas par hasard si le logo de River Cleanup se compose de trois cercles, une petite goutte qui ne cesse de s’élargir. L’impact d’un seul individu - d’une seule gouttelette - peut être colossal.